L'instauration d'un systeme a volets multiples pour les retraites en federation de Russie : modele Chilien ou Suedois?
Durant les premieres annees de transition, la protection sociale n'a pas ete au centre des debats des chercheurs, des dirigeants et des experts internationaux. Deux raisons peuvent etre avancees pour expliquer ce desinteret relatif.
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Дата: | 2005 |
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Автор: | |
Формат: | Стаття |
Мова: | French |
Опубліковано: |
Кримський науковий центр НАН України і МОН України
2005
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Назва видання: | Культура народов Причерноморья |
Онлайн доступ: | http://dspace.nbuv.gov.ua/handle/123456789/33039 |
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Назва журналу: | Digital Library of Periodicals of National Academy of Sciences of Ukraine |
Цитувати: | L'instauration d'un systeme a volets multiples pour les retraites en federation de Russie : modele Chilien ou Suedois? / V. Berenger // Культура народов Причерноморья. — 2005. — № 58. — С. 159-172. — Бібліогр.: 41 назв. — фр. |
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irk-123456789-330392012-05-27T14:19:21Z L'instauration d'un systeme a volets multiples pour les retraites en federation de Russie : modele Chilien ou Suedois? Berenger, V. Durant les premieres annees de transition, la protection sociale n'a pas ete au centre des debats des chercheurs, des dirigeants et des experts internationaux. Deux raisons peuvent etre avancees pour expliquer ce desinteret relatif. В течение переходного периода, социальная защита не находилась в центре дискуссий исследователей, руководителей и международных экспертов. Можно отметить две причины отсутствия интереса к этому вопросу. 2005 Article L'instauration d'un systeme a volets multiples pour les retraites en federation de Russie : modele Chilien ou Suedois? / V. Berenger // Культура народов Причерноморья. — 2005. — № 58. — С. 159-172. — Бібліогр.: 41 назв. — фр. 1562-0808 http://dspace.nbuv.gov.ua/handle/123456789/33039 fr Культура народов Причерноморья Кримський науковий центр НАН України і МОН України |
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Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN
FEDERATION DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
Durant les premières années de transition, la protection sociale n’a pas été au centre des débats des
chercheurs, des dirigeants et des experts internationaux. Deux raisons peuvent être avancées pour expliquer ce
désintérêt relatif.
Tout d’abord, dans l’ancien système, la protection sociale n’avait aucune réelle existence réelle en tant que
telle, elle était entièrement assumée par l’Etat et se caractérisait par l’attribution de droits sociaux garantis et
intangibles. L’effondrement du système d’économie planifié s’est traduite par le rejet de toute forme
d’interventionnisme et par une confiance presque aveugle dans les vertus régulatrices du marché tant en matière
de production et que de répartition des ressources.
Pourtant, la transition a fortement ébranlé les principes idéologiques des régimes socialistes en raison de la
chute des revenus en termes réels, de l’apparition du chômage et de poches de pauvreté. Les systèmes de
protection sociale se sont vite révélés totalement inefficaces pour répondre à des problèmes radicalement
nouveaux dans un contexte économique en profonde mutation. Ils auraient même contribué à creuser les
inégalités. Les gouvernements des économies en transition ont donc pris conscience de la nécessité
d’accompagner la réforme économique d’une réforme sociale. Pour ce faire, certains bénéficient du soutien des
organisations internationales telles que le FMI et la Banque Mondiale pour lesquels la réforme sociale représente
un enjeu véritable de la réforme économique et politique.
La Banque Mondiale qui en général réserve ses prêts pour financer des investissements productifs ou de
grandes infrastructures propose son modèle de protection sociale et soutient les pays s’engageant à adopter sa
proposition.
Les réformes préconisées concernent essentiellement les retraites qui représentent la composante principale
des systèmes de protection sociale. Dans toutes les économies développées, en développement ou en transition, les
régimes publics de retraites fonctionnant par répartition connaissent une crise de leur financement qui est
considérée non pas simplement comme passagère mais comme durable et profonde. Les sombres perspectives
démographiques et par conséquent la part croissante du revenu qui devra être transférée des actifs vers les retraités
pose désormais le problème de la santé financière de ces régimes.
Ces difficultés ont contribué à relancer la polémique entre l’adaptation des régimes par répartition et la
capitalisation. Ainsi, selon la Banque Mondiale et le FMI, la solution aux difficultés résiderait dans l’adoption
d’un système comportant trois piliers et ouvrant la voie au rôle joué par la capitalisation.
Depuis la fin des années 90, certains pays d’Europe Centrale et Orientale et de l’ex-URSS se sont engagés à
réformer leur régime de pension afin de l’adapter aux caractéristiques de l’économie de marché. Sur ce point, les
différents pays ne semblent pas former un bloc monolithique. Bien qu’ils aient emprunté des voies différentes, la
capitalisation se présente à des degrés divers comme une échappatoire à la crise financière de la répartition. Ainsi,
la Hongrie (1998), la République Tchèque et la Pologne (1999) ont choisi de mettre en place des systèmes mixtes
combinant la répartition et la capitalisation.
Le Kazakhstan (1998) est le pays qui a le plus réformé son système en substituant la capitalisation à la
répartition sur la base du modèle chilien.
La Fédération de Russie semble dans ce domaine emprunter une voie quelque peu différente même si la
capitalisation est aussi la solution préconisée. Le programme de réforme de 1998, dont la mise en application a
commencé en 2001 et s’étalera sur plusieurs années, prévoit en effet la mise en place d’un système de retraite à
trois piliers se caractérisant par une extension progressive du rôle joué par la capitalisation, mais dont la gestion ne
semblerait pas totalement soumise aux administrations privées, du moins au cours de la phase d’instauration. Bien
que la réforme reflète une certain nombre de décisions prises en matière d’objectifs, de modalités de financement,
de règles d’attribution suggérant par là-même la construction d’un nouveau modèle de protection sociale, ce
modèle semble pourtant encore à l’heure actuelle en phase de construction ou de déconstruction marquée de
l’ancien système ?
Nous proposons de nous appuyer sur les expériences étrangères en matière de régime de retraites et de
protection sociale pour interpréter et donner un état des lieux des réformes du système de retraite menées en
Fédération de Russie depuis le début de la transition. Précisément, au travers de l’analyse du système russe, notre
objectif est de montrer que la question des retraites ne se résume pas à un simple choix de technique de
financement : répartition et/ou capitalisation mais elle doit prendre en compte le poids du passé, la finalité de la
retraite et le cadre budgétaire dans lequel le système de retraite fonctionne.
En premier lieu, il s’agit de rendre compte des difficultés financières du Fond de Pension fonctionnant par
répartition et d'étudier les différences entre cette crise et celle que connaissent les pays occidentaux ?
En second lieu, en tenant compte des caractéristiques du contexte économique, sociale et politique, nous
présentons les arguments justifiant le recours à la capitalisation et le développement des fonds de pension privés
dans le cadre d’un modèle à volets multiples. Enfin, nous nous interrogerons sur la réalité concrète de la technique
de capitalisation à partir de l’examen de la réforme du régime des retraites adoptée en 2001 et ayant pris effet en
2002. Cette réforme envisage l’instauration de la capitalisation selon des modalités particulières qui laissent à
penser que la Fédération de Russie n’est peut-être pas totalement prête pour les fonds de pensions privés.
I. La crise financière du Fonds de Pension de Russie : la mise en perspective d’une conjugaison contradictoire
entre le financement des retraites par répartition et l’adoption d’un modèle d’assurance sociale purement fictif
Le processus de transition a entraîné une détérioration des indicateurs sociaux se matérialisant par l’apparition
du chômage, la baisse des revenus en termes réels, une augmentation de la pauvreté et des inégalités impliquant
par là-même une augmentation des besoins de transferts de la part de l’Etat.
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
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Au cours des premières années de la transition, le système de protection sociale a dû être reconfiguré. Il a
acquis alors une visibilité concrète qui a contribué à exacerber ses problèmes de financement et son inadaptation
aux conditions du marché.
En économie planifiée, la protection sociale n’avait aucune existence autonome, elle relevait entièrement de la
responsabilité de l’Etat.
L’Etat était d’emblée un Etat-providence offrant la garantie de l’emploi et assurant l’existence de tous les
membres de la société. Le système de protection sociale était extensif car il couvrait les risques majeurs de
l’existence et prenait en charge tous les individus de la « naissance à la mort ». Les dépenses étaient prises en
charge par le budget de l’Etat et financées par des prélèvements effectués sur les entreprises d’Etat et la répartition
des sommes allouées était confiée aux syndicats. Dans ce schéma, la protection sociale était profondément liée au
travail, elle reposait une solidarité professionnelle corporatiste en raison de l’existence d’un système de privilèges
pour certaines catégories de travailleurs. Les retraites, composante intégrante du système, étaient accordées en
contrepartie de la participation à l’activité économique. Le système était à prestations définies et financé selon le
principe de la répartition.
Comme dans la plupart des pays d’Europe, les régimes de retraite financés par répartition subissent les effets
de la situation économique et sont confrontés au défi du vieillissement démographique. Comme on le sait, en
répartition, les retraites du moment sont financées à partir des cotisations prélevées sur les générations des actifs
de la période courante. En théorie, la répartition exige à tout moment le respect de la contrainte budgétaire à savoir
l’équilibre entre les recettes et les dépenses au cours de la période courante :
• PT = • w L
Ainsi, le taux de remplacement de la pension (•) qui mesure le niveau de vie relatif des retraités par rapport
aux actifs peut être déterminé à n’importe quel moment par la relation suivante :
• = (L/PT) •
De même, le taux de cotisation (•) du régime par répartition vaut :
• = • / (PT / L)
dans laquelle (PT / L) est le taux de dépendance, c’est à dire le nombre de retraités pour chaque travailleur.
Les facteurs dominants cette contrainte sont de nature démographique, économique mais également politique.
Pour faire face à la charge financière due au vieillissement démographique qui se manifeste par une augmentation
du taux de dépendance, la contrainte suggère plusieurs voies de rééquilibrages :
- la hausse des cotisations ;
- la diminution de la valeur relative des prestations servies ;
- le relèvement de l’âge de cessation d’activité pour diminuer le taux de dépendance
qui ne sont pas sans poser des problèmes d’équité et d’efficacité dont la résolution risque d’ailleurs d’être
conflictuelle.
Toutefois, la crise du régime des retraites en Russie revêt des caractéristiques particulières que l’on retrouve
dans les économies en transition. La réforme mise en œuvre au début des années quatre-vingt dix a précisément eu
pour effet d’accentuer et d’exacerber cette particularité.
En effet, compte tenu de l’engagement de l’Etat à assurer une certaine stabilisation de ses finances publiques,
la première étape de la réforme a consisté à engager une transformation de l’organisation et du financement du
système de protection sociale. Le système acquiert alors une visibilité concrète qui ne le rend pas pour autant plus
lisible. La protection sociale prend les apparences du modèle de l’assurance sociale alors que les conditions
concrètes de sa mise en œuvre sont loin d’être établies.
La réforme se matérialise par la création de quatre fonds extrabudgétaires (qui s’apparente aux caisses du
régime général) spécialisés par risques et alimentés par des cotisations employeurs au bénéfice de leurs salariés.
Le Fonds de Pension, crée en 1990 est le plus important, il engrange 28 % de la masse salariale des entreprises et
1 % des revenus des salariés au titre des contributions individuelles. Du point de vue de l’organisation et du
financement, le principe retenu est manifestement celui de l’assurance sociale qui représente un moyen pour l’Etat
de reporter la charge du financement de certaines dépenses hors budget.
Sur le plan idéologique, cette réforme peut s’interpréter comme une réaction contre le paternalisme de l’Etat
visant à rendre le citoyen responsable de son existence. En théorie, l’existence du Fond de Pension a pour objet de
garantir l’indépendance financière du régime de retraite par rapport au budget de l’Etat. Le financement des
prestations par des prélèvements à affectations spéciales est sensé satisfaire cet objectif en rendant les pensions
indépendantes de considérations politiques et budgétaires. Dans le même temps, le Fonds ne doit servir à autre
chose qu’au financement des pensions. En outre, comme dans le modèle de l’assurance sociale, le principe de
l’assurance exige que soit rendu visible un lien entre les cotisations versées et prestations reçues par les individus.
En d’autres termes, les prestations versées doivent dépendre du montant cotisé au cours de la période d’activité.
La réforme se caractérise ainsi par la remise en cause du principe de non-affectation des recettes et de
globalisation des dépenses et le transfert quasi exclusif de la charge du financement des retraites sur les
entreprises.
Bien que cette réforme suggère une transformation radicale du système de protection sociale, il n’en est rien.
Elle s’est simplement limitée à habiller différemment le système communiste en maintenant les pratiques
anciennes en matière d’attribution des prestations.
Le Fonds de Pension financé par répartition connaît une crise de financement due aux circonstances de la
transition mais amplifiée par la transformation de son organisation et de son financement.
Avec l’initiation de la réforme économique et politique, l’augmentation des besoins en matière de dépenses
s’est considérablement accélérée alors que dans le même temps la base fiscale et les recettes ont subi une forte
érosion. La transition a eu pour effet d’accentuer l’effet de ciseaux entre les recettes et les dépenses.
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L’augmentation des dépenses s’explique par l’augmentation du nombre des bénéficiaires sous l’effet de
l’évolution des facteurs économique, démographique mais également du maintien des caractéristiques du système
hérité.
Le système de retraite accorde des pensions trop tôt selon des règles d’éligibilité qui étaient déjà souples mais
qui ont été rendues plus libérales encore compte tenu du contexte économique. Comme au temps de l’Union
Soviétique, l’âge légal de départ à la retraite est fixé à 55 ans pour les femmes et à 60 ans pour les hommes. Il est
très faible par rapport aux standards internationaux et il peut même être anticipé dans certaines professions. En
outre, le système ne comporte aucun mécanisme visant à réguler le montant des pensions en fonction de l’âge de
départ à la retraite. En effet, les retraités peuvent cumuler la totalité de leur pension tout en percevant des revenus
d’activité alourdissant du même coup la charge des retraites et favorisant le dumping social sur le marché du
travail1. A cela, il faut ajouter l’existence de différentes dérogations déconnectant l’âge effectif de l’âge théorique
de la retraite. Le gouvernement qui, théoriquement, n’est pas autorisé selon la loi à modifier les prestations et leur
distribution, a mis en œuvre un certain nombre de mesures ayant eu pour effet d’accroître le nombre de
bénéficiaires. Pour faire face à l’apparition du chômage, elles ont consisté à réduire la période d’activité et
favoriser les départs en préretraites. En se substituant aux indemnités de chômage, les retraites ont ainsi servi à
réduire les effectifs sans augmenter le nombre de chômeurs. Toutefois, comme l’Etat n’a prévu aucun moyen
budgétaire, ces avantages ont pesé sur le budget du Fonds de Pension. Il faut également tenir compte de
l’existence de règles très souples en matière d’éligibilité aux pensions d’invalidité. Ces dernières sont accordées
notamment lorsque la capacité de revenu des individus est réduite alors que les bénéficiaires continuent à
travailler. Enfin, le développement du travail dans le secteur informel a contribué à une réduction du nombre de
cotisants sans que cela ne se traduise par une diminution des bénéficiaires au titre de la pension sociale ou de
l’ancienneté.
L’accroissement des besoins de dépenses pose immanquablement la question de leur financement dans un
contexte de ressources limitées. Les recettes ont subi une forte érosion liée à la conjugaison de plusieurs facteurs
qui ont eu pour effet de réduire le nombre de cotisants et le taux effectif de prélèvement.
Le Fonds de Pension est financé principalement par des cotisations employeurs dont le taux de 28 % est
relativement élevé comparé à la moyenne des principaux pays industriels et dont la base fiscale est étroite, compte
tenu du faible niveau de la masse salariale comparée au PIB. Celle-ci a par ailleurs considérablement diminué au
cours des années 90 sous l’effet de la baisse de la production. Comme dans les économies centralement planifiées,
le système fiscal n’était pas établi sur la base de lois fiscales codifiées, les taux de prélèvement étaient souvent
négociés entre les entreprises et l’Etat2. L’administration se limitait uniquement aux informations fournies par le
plan. En outre, dans la mesure où les prélèvements n’étaient pas individualisés, les individus n’avaient pas
conscience de payer indirectement des impôts ni même des coûts de certains biens sociaux. L’impact de la
transition s’est traduit par une chute des recettes fiscales et en particulier des cotisations sociales. « Le poids de
l’ancien système a favorisé le développement d’une attitude hostile envers le paiement de contributions
explicites »3. Elles sont considérées comme des charges. Compte tenu de la faiblesse de l’administration fiscale,
les employeurs ont cherché à échapper aux cotisations en usant de différents moyens :
- en ne déclarant pas la totalité des rémunérations versées ;
- en accordant des compensations à la place des rémunérations aux salariés ;
- en ne versant pas la totalité des cotisations ;
- en utilisant des moyens non monétaires pour obtenir des arriérés de cotisations notamment pour les
entreprises en difficultés financières.
Ce phénomène a en outre été encouragé par la nature même des cotisations sociales. Celles-ci revêtent la
forme d’un prélèvement dépersonnalisé, leur contrepartie concerne l’ensemble des assurés. Dans la mesure où les
pensions ne dépendent pas des contributions versées en raison d’un certain nombre d’exceptions à la règle et de la
formule de calcul des prestations, il n’y aucune incitation aussi bien du côté des employeurs que des salariés à se
conformer à la réglementation4. Loin d’être identifié à un salaire différé, les cotisations cumulent les effets
négatifs des prélèvements en affectant le marché du travail et en contribuant au développement du secteur
informel.
Ainsi, ces différents aspects peuvent être saisis en adaptant la formulation de la contrainte financière du
système par répartition au cas de la Fédération de Russie de façon à tenir compte de certaines caractéristiques
particulières à la transition5 :
Avec : • = le taux de cotisation,
L = le nombre de travailleurs actifs dans les secteurs formel et informel,
1 Tomes I. (1997), « Overview of Social Income Reform Approaches of the Countries of Central and Eastern Europe », Social
Research, vol.64 (4), p.1471-1498.
2 Voir Tanzi V., Tsibouris G.C., (2000), Fiscal Reform over Ten Years of Transition, IMF Working Paper, WP/00/113.
3 Kornai J., (1997), Struggle and Hope, Essays on Stabilization and Refom in Post Socialist Economy, Edwaed Elgar Publish-
ing Limited, Massachusetts, p.239-254.
4 Rimachevskaïa N., (1997), « Le troisième âge et la transition en Russie », le Courrier des Pays de l’Est, juillet, n°420, p.34-
46.
5 Cette contrainte a été élaborée à partir de celles formulées respectivement par Branco, M.de Castello, (2000) et Gray C.,
Weig D., (1999).
( ) pP1wcL T=τ−θ
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
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c = la proportion de travailleurs du secteur formel (proxy pour déterminer le taux de ceux qui se soumettent à
la réglementation fiscale),
• = les transferts provenant du budget,
PT = le nombre de ceux qui bénéficient d’une pension.
Selon l’analyse précédente, trois catégories de retraités peuvent ainsi être identifiées :
Pr = nombre de ceux qui ont bénéficié d’une réduction de l’âge de la retraite dans les secteurs à risques,
Pa = ceux qui ont obtenu une pension d’invalidité en raison du laxisme de l’administration,
Po = les autres pensionnés.
Introduisons dans l’expression précédente, les deux paramètres suivants :
• = p / w
Avec (•) désignant le taux de remplacement moyen du système
et
d = PT / L
où (d) définit le taux de dépendance au système.
Il vient que le taux de contribution qui doit être prélevé pour garantir le versement des pensions vaut :
Il est inversement lié à la proportion de ceux qui cotisent effectivement et au montant des transferts pris en
charge par le budget.
Si le taux de cotisation est fixe, il vient que :
Ainsi, sous l’effet conjugué d’une diminution de (c), d’une diminution des transferts (•) et d’une
augmentation du taux de dépendance, le respect de la contrainte budgétaire en répartition implique nécessairement
une baisse du taux de remplacement.
La conjugaison de ces différents facteurs a eu donc eu deux conséquences : une baisse des contributions (les
taux de contribution effectifs étant bien inférieur au taux de contribution statutaire) et une explosion du nombre de
bénéficiaires et une baisse du nombre des cotisants.
Ainsi, la hausse du ratio de dépendance qui en résulte est supérieure au taux de dépendance démographique en
raison de la forte croissance du nombre des pensionnés d’âge actif et des personnes non cotisantes. Comme le
suggère la contrainte financière du régime par répartition, l’ajustement a entraîné une baisse du taux de
remplacement. En outre, sous l’effet de l’inflation, les retraités ont subi une baisse de la valeur réelle de leur
pension car la formule des prestations ne comportait aucun mécanisme d’indexation automatique. Pour atténuer
les méfaits de l’inflation, les indexations ont été souvent insuffisantes et ont été mises en œuvre avec retard créant
ainsi des distorsions dans le calcul des prestations.
L’extension du nombre des privilèges accordés à certaines catégories et la modification du calcul du montant
de la pension minimum en 1992 (en référence au salaire minimum) a engendré un nivellement des pensions. Le
rapport entre le niveau de la pension maximum et le montant de la pension minimum (initialement fixé à 3) s’est
réduit et l’écart entre le niveau de la pension et le salaire perçu antérieurement s’est creusé.
En outre, le système de retraite a engendré des inégalités entre les anciens et nouveaux retraités en raison de
l’augmentation des écarts de salaires servant de référence au calcul des pensions. Au lieu de favoriser la
redistribution verticale, il a favorisé une minorité de personnes, comme les femmes, certaines catégories
bénéficiant d’une longue espérance de vie, de hauts revenus et de périodes plus courtes de contributions. Les
difficultés financières ont été accentuées sous l’effet de la crise financière de 1998 et ont d’ailleurs conduit à une
accumulation d’arriérés de pensions.
Compte tenu de ces évolutions, le régime par répartition serait inefficient et engendrerait des iniquités.
Pourtant, cette conclusion mérite d’être nuancée.
Les difficultés du Fonds de Pension et l’inefficacité de la répartition sont liées à l’absence des conditions
nécessaires à la mise en œuvre des conditions du principe de l’assurance sociale au niveau de ces caractéristiques
microéconomiques. Seuls l’organisation et le financement ont été retenus mais de manière insuffisante, tandis que
les modalités d’attribution des pensions sont restées celles qui prévalaient dans le modèle soviétique.
Le Fonds de Pension par répartition a dû prendre en charge un système très généreux en matière de couverture
accordant des pensions comme un droit de citoyenneté. La maturité du système est largement supérieure à celle
que connaissent les régimes de répartition des pays industrialisés relevant de l’assurance sociale ce qui rend
inévitable la question de la viabilité à long terme du Fonds de Pension.
Les cotisations, seules sources de financement, ont servi à financer des pensions non contributives ne relevant
pas de l’assurance sociale et qui devaient incomber normalement à l’Etat. Ainsi, les principes de non-affectation
des ressources et de globalisation des dépenses n’ont en réalité pas été abandonnés car au lieu de servir à la
( )
d
c1 θτ−=ρ
( ) ( )c1
d
1wcL
PT
τ−
ρ=τ−
ρ=θ
163
protection des salariés les cotisations ont été utilisées pour assurer la protection de la population6. Le Fonds de
Pension semble de ce point de vue avoir servi de substitut à un financement déficitaire par l’emprunt. Le système
d’assurance sociale n’a pas eu de réalité concrète. Le désengagement de l’Etat, la faiblesse de l’administration
fiscale et le maintien du modèle ancien ont eu en définitive pour effet de transformer un modèle de prestations
forfaitaires reposant sur une conception extensive de redistribution sociale en un modèle de prestations forfaitaires
n’assurant même pas le minimum vital. La faille semble manifestement liée à l’inadéquation entre la nature des
prestations et leur source de financement. Les difficultés tiennent pour partie au fait qu’aucun modèle de
protection sociale et de retraite en particulier déterminant les finalités du régime de retraite n’a été associé à la
réforme de l’organisation et du financement du système soviétique.
La finalité des systèmes d’assurance sociale qui fonctionnent dans les économies de marché est d’assurer un
revenu de remplacement en contrepartie de l’exercice d’une activité professionnelle. Pour en bénéficier, il faut
avoir cotisé pendant une certaine période.
Cette finalité justifie le financement par des cotisations qui jouent le rôle de prime d’assurance. Contrairement
à l’assurance privée, les cotisations ne sont pas liées à la probabilité individuelle d’occurrence du risque, elles sont
proportionnelles au salaire. Les prestations sont ainsi contributives et déterminées en fonction des cotisations. Non
universel, ce modèle peut exclure certaines catégories de personnes. Dans cette éventualité, c’est l’assistance,
financée par la fiscalité, qui prend le relais de l’assurance par le versement de pension dite sociale. Ces systèmes
sont généralement autonomes et bien que les cotisations représentent des prélèvements publics, le rôle de l’Etat
n’est jamais que subsidiaire. Lorsque ces systèmes se sont développés en Europe, ils ont bénéficié d’un contexte
démographique et économique très favorable. Le financement des retraites par répartition a permis aux premières
générations de bénéficier d’importants transferts sans qu’elles aient pour cela nécessairement cotisé pleinement au
préalable. Le système par répartition a permis de soutenir la demande et la croissance mais également de réduire
les écarts de niveau de vie entre les actifs et les retraités. Ce mécanisme repose sur l’établissement d’un contrat
liant les générations entre elles au terme duquel les générations d’actifs acceptent de financer les pensions des
inactifs âgés en espérant que les futurs actifs adopteront le même comportement. Le maintien du contrat repose en
fait sur le pouvoir fiscal de l’Etat à imposer la génération future. Parallèlement à ces régimes de base, des régimes
complémentaires se sont déployés. Ils ont eu pour objet de compléter les taux de remplacement des régimes de
base. Leur développement est d’ailleurs inversement proportionnel à la générosité des premiers.
Comme l’expérience européenne le suggère, aucune des conditions permettant à la répartition d’être efficace
n’existait en Fédération de Russie.
La transition économique aurait exacerbé des problèmes latents, absents ou cachés dans le système antérieur,
tandis que la réforme rend compte des difficultés que pose le greffage d’un modèle de protection sociale
d’économie de marché à un système adapté au fonctionnement d’une économie planifiée.
Est-ce que le recours à la capitalisation se présente pour autant comme une échappatoire au problème des
retraites ?
II. La mise en place d’un système à volets multiples basé sur le développement des fonds de
pensions comme échappatoire à la crise des régimes par répartition : le modèle à volets multiples de la Banque
Mondiale et quelques expériences étrangères
Selon l’analyse précédente, la séparation « fictive » du fonds de pension du budget de l’Etat aurait contribué à
rendre explicite l’inadaptation du système ancien aux exigences de l’économie de marché. Le système s’avère
coûteux d’un point de vue économique et social dans la mesure où il crée des distorsions sur le marché de
l’emploi et des capitaux et où il n’assurerait qu’une redistribution injuste sans garantir un niveau de retraite
suffisant. En outre, le vieillissement démographique dont les effets se manifesteront dès les années 2010
exacerbera les difficultés budgétaires accentuant la pression sur les finances publiques. Tandis que le ratio de
dépendance est de l’ordre de 60 % actuellement, il atteindrait 70 % en 2015 puis 108 % en 2053. Selon les
projections, le maintien du régime de retraite nécessiterait un taux de cotisation de 35% de la masse salariale de
sorte que 10.3 % de la richesse produite en 2053 serait consacrée aux dépenses de pensions. La viabilité financière
du Fonds de Pension par répartition est remise en question. Compte tenu du faible niveau des pensions, des
difficultés à collecter les cotisations et de la situation budgétaire de l’Etat, les marges de manœuvre semblent
considérablement réduites pour assurer le respect de la contrainte budgétaire. Dans ces circonstances, la garantie à
long terme des retraites en répartition s’expose au risque de dépendre de considérations politiques et budgétaires
susceptibles d’affecter profondément les termes du contrat intergénérationnel qui caractérise le fonctionnement de
la répartition.
C’est précisément sur ce type de constat que s’appuient les décideurs politiques mais également les
organisations internationales pour engager ou préconiser une réforme systémique des retraites. Ainsi, dès 1994, la
Banque Mondiale soumet à l’attention des PECO et des pays de l’ex-URSS la possibilité d’instaurer un régime de
retraite privatisé à trois piliers ouvrant la voie au rôle joué par les fonds de pension capitalisés dans le financement
des retraites et de l’économie. Le Chili, qui fut le premier pays à être passé dès 1980 d’un système par répartition
à un système par capitalisation privée, est ainsi présenté comme une référence pour vanter les mérites d’un modèle
à plusieurs piliers.
A la fin des années 90, un certain nombre de pays d’Europe Centrale et Orientale ainsi que de l’ex-URSS ont
entrepris d’explorer la nouvelle voie ouverte par le Chili : celle des fonds de pension. Sans être une pure réplique
du modèle préconisé par la Banque Mondiale, les réformes adoptées dès 1998 s’en inspirent fortement. Elles
6 Rimachevskaïa N. (1997), « Le troisième âge et la transition en Russie », le Courrier des Pays de l’Est, juillet, n°420, p.34-
46.
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
164
prévoient toutes des mesures de court terme permettant le recalibrage du régime par répartition existant
(relèvement de l’âge de la retraite, condition d’accès plus difficile aux prestations, élargissement de la base des
cotisations, indexation sur le salaire net) et des mesures de long terme recourant à une privatisation, selon des
degrés divers, du régime des retraites dans le cadre d’un système à volets multiples. De ce point de vue, les pays
ne forment pas un bloc monolithique, certains ont adopté des solutions novatrices s’inspirant parfois des réformes
mises en œuvre dans les pays d’Europe occidentale et en particulier en Suède.
Ainsi, la Hongrie7 (1998), la Pologne (1999) ont choisi un système mixte combinant la répartition et la
capitalisation obligatoire à travers un système de fonds de pension privés.
De même, créant ainsi des précédents majeurs, la Lettonie et le Kazakhstan ont emprunté des trajectoires
relativement différentes pour ajuster leur régime de retraite.
La Lettonie a privilégié le gradualisme en modifiant d’abord les paramètres de son régime par répartition
(1996) sur la base de la réforme suédoise pour ensuite le compléter par des comptes d’épargne individuels
obligatoires gérés par des fonds de pension (1999-2001). En revanche, le Kazakhstan (1998) est le pays qui s’est
le plus inspiré du modèle chilien en substituant le principe de la capitalisation à celui de la répartition.
Le Fédération de Russie s’est également engagée dès 1998 avec le soutien de la Banque Mondiale à adopter
une variante du modèle à plusieurs piliers. Toutefois, en raison, de contraintes politiques mais également
économiques liées à la crise financière de 1998 l’application du programme de réforme établi en 1998 a été
reportée en 2002. Mais, les caractéristiques du modèle de retraite adopté en 2002 ne correspondent pas exactement
à celles qui étaient initialement prévues. Alors que la Fédération de Russie prévoyait une introduction plus
radicale de la capitalisation, la réforme de 2002 suggère une attitude de prudence et de réserve concernant la place
réservée à la capitalisation dans le cadre du modèle à plusieurs piliers. En outre, l’introduction de la capitalisation
n’est pas sans faire resurgir certaines interrogations relatives notamment à la question de l’autonomie du Fonds de
Pension par rapport au budget fédéral dans la gestion des sommes prélevées.
Avant d’aborder l’analyse des réformes de 1998 et 2002, il semble nécessaire de présenter les caractéristiques
du modèle recommandé par la Banque mondiale et les avantages qu’il reconnaît à l’extension de la capitalisation à
cotisations définies.
Le modèle à volets multiples se fonde sur la dissociation des fonctions de la retraite que sont la redistribution,
l’assurance et l’épargne. Ces fonctions doivent être prises en charge par des techniques de financement et des
modes de gestion différents se caractérisant par des degrés d’implication différents des administrations publiques.
Ainsi, le premier pilier aurait en charge la redistribution cependant limitée à atténuer la pauvreté. Il serait
financé par le budget de l’Etat et fonctionnerait en répartition.
Le second pilier qui vise la fonction d’assurance constitue la principale composante du système de retraite. Il
serait obligatoire parce que l’existence du premier pilier pourrait inciter les comportements de hasard moral et de
passager clandestin mais aussi parce que les individus sont myopes et n’adoptent pas de manière spontanée un
comportement d’épargne optimal. Il serait entièrement capitalisé et géré par des fonds de pension privés que
choisiraient les individus. Il pourrait prendre la forme de comptes de retraite individuels ou de régimes de retraite
professionnels. Il permettrait de rétablir le lien entre le montant des cotisations versées et les pensions reçues, car
ces dernières seraient déterminées à partir des revenus procurés par l’investissement des cotisations sur le marché
financier. Ainsi, les contributions auraient véritablement le statut d’une épargne.
Le troisième pilier correspond à la fonction d’épargne. Il s’agit de la réplique du second pilier sauf qu’il est
facultatif et destiné à ceux qui souhaitent obtenir des taux de remplacement supérieurs à ceux qu’accordent les
piliers obligatoires.
L’adoption d’un tel système est souvent justifiée en soulignant les effets positifs attendus d’un système par
capitalisation à cotisations définies par rapport au maintien de la répartition.
Les effets attendus sont des effets macro-économiques sur le marché de l’emploi et sur le marché du capital et
corrélativement sur la croissance. Les fonds de pensions devraient assister le développement des marchés
financiers et la croissance économique.
Dans la mesure où les cotisations jouent un rôle actif dans la détermination du montant de la pension, elles
contribuent à réduire les distorsions provoquées sur le marché du travail par le niveau élevé des taux de cotisations
qui sont ressenties comme un impôt et moins comme une épargne en répartition. Ainsi, les individus auraient
intérêt ainsi que les employeurs à se soumettre à la réglementation. Ce qui réduirait l’évasion fiscale et
augmenterait le rendement des prélèvements. En outre, dans la mesure où ce système ferait appel directement à la
participation des salariés, il contribuerait à réduire les prélèvements effectués sur les employeurs et donc l’effet de
ciseaux provoqué par l’écart entre le coût du travail et le salaire net sur le marché de l’emploi. Enfin, les systèmes
à cotisations définies facilitent la mobilité des travailleurs et donc favorisent une meilleure allocation des
ressources.
Comme les cotisations sont accumulées dans des comptes d’épargne, elles permettent le développement d’une
épargne de long terme et de stimuler ainsi la formation du capital. Toutefois, l’impact lié au passage à un système
par capitalisation sur le taux d’épargne national n’est pas confirmé sur le plan empirique.
Les fonds de pensions peuvent aider au développement des marchés financiers et influencer positivement leur
liquidité et la capitalisation boursière. Les actifs détenus par les fonds de pensions représentent des demandes
potentielles de nouveaux instruments financiers, de nouvelles institutions financières, ils améliorent ainsi la
7Après avoir voté une loi autorisant l’établissement et le fonctionnement de plans de pensions privés facultatifs en 1993, la
Hongrie est le premier pays d’Europe Centrale et Orientale à introduire en 1998 un régime de privatisation à volets multiples.
165
liquidité et l’étendue des marchés et stimulent ainsi la croissance. L’expérience chilienne semble confirmer
l’existence d’un lien entre développement des marchés financiers et croissance économique. Le passage à la
capitalisation aurait permis une utilisation efficiente du capital même s’il est difficile d’isoler cet effet de l’impact
induit par d’autres réformes mises en œuvre au cours de cette période au Chili8. En Hongrie, le développement
des marchés financiers a été un des motifs qui a justifié la réforme des retraites.
La capitalisation privée corrigerait les distorsions induites par les régimes par répartition sur la redistribution.
En faisant dépendre la pension de toute la période de cotisation, elle éliminerait la redistribution en faveur des
classes d’âge plus aisées bénéficiant d’une espérance de vie plus longue.
Contrairement à la répartition, la capitalisation serait moins sensible aux risques économique, démographique
et politique. En revanche, elle subit les risques de fluctuation des marchés financiers, de mauvaise gestion des
actifs. Selon les experts, l’avantage d’un modèle à volets multiples est précisément de permettre une meilleure
diversification des risques. Toutefois, bien que la comptabilisation des cotisations dans des comptes individuels
réduise le risque que les surplus de cotisations soient utilisés pour financer les déficits publics, ils ne sont pas
entièrement protégés notamment si l’Etat garantit une assurance contre le risque d’insolvabilité financière. Dans
cette éventualité, les pensions représentent des obligations publiques contingentes9.
Néanmoins, ces arguments pourraient tour à tour être nuancés10 mais ils acquièrent une importance
particulière dans les économies en transition compte tenu de l’incapacité des régimes en place à assurer le
financement de pensions adéquates et de la perte de confiance que manifestent les individus à l’égard de l’Etat.
Or, comme on le sait, l’un des obstacles majeurs à l’introduction de la capitalisation est le financement de la
transition. Dans la transition d’un régime par répartition à un régime par capitalisation, on sait que ce qui est en
cause est le sort des générations sacrifiées c’est à dire de celles qui sont obligées de cotiser pour financer les
engagements pris en répartition à l’égard de celle qui les précèdent tout en cotisant pour constituer des réserves
indispensables au versement de leurs propres retraites en capitalisation. Les droits à pensions acquis représentent
des promesses de pensions faites par l’Etat sans avoir prévu de fonds à cet effet. La valeur actualisée de ces droits
représente une dette implicite qui ne paraît pas dans la comptabilité publique. Le passage de la répartition à la
capitalisation transforme la dette implicite en dette publique. Le problème est alors de savoir s’il existe un
mécanisme de compensation sans qu’aucune génération ne soit sacrifiée. Sur ce point, la technique employée
consisterait pour l’Etat à émettre un emprunt qui serait remboursé par des prélèvements opérés sur les générations
futures et dont le produit servirait à dédommager les générations sacrifiées. Si le coût de l’emprunt est supérieur
au taux de rendement implicite de la répartition, la transition augmentera la charge de la dette. Une consolidation
fiscale serait alors nécessaire pour limiter la croissance de la dette publique.
Globalement, selon les études théoriques, la transition aurait un impact négatif sur le bien-être
intergénérationnel. En revanche, si la répartition crée des externalités négatives du fait des distorsions qu’elle
produit sur le marché du travail et sur l’arbitrage entre consommation et épargne, alors la transformation du
système en éliminant ces charges permettrait de dégager des surplus qui faciliteraient le remboursement de la
dette11.
Mais il existe d’autres alternatives pour effectuer la transition. La première consisterait à répudier une partie
de la dette implicite en opérant un recalibrage du régime par répartition de façon à réduire les taux de
remplacement. La seconde consisterait à allouer les recettes de privatisation dans un fonds de réserves afin de
financer les promesses de pensions du régime par répartition. Globalement, selon les études théoriques, la
transition aurait un impact négatif sur le bien-être. Evidemment, l’impact distributif lié au passage en
capitalisation dépend de la vitesse à laquelle il s’opère.
Cependant la réussite de la réforme exige que certaines conditions institutionnelles, politiques et économiques
soient au préalable satisfaites12. En particulier, elle nécessite l’existence d’un cadre réglementaire pour superviser
les placements de fonds de pensions et éviter les prises de risques excessives. Elle suppose l’existence préalable
d’un système financier du moins rudimentaire et d’un système bancaire privé afin de procurer des actifs. Ces
conditions ne sont pourtant pas toujours vérifiées dans ces économies.
III. La réforme de 2002 ou l’instauration d’un système à volets multiples basé sur le développement des fonds
de pensions : la Russie en quête d’un modèle des retraites ?
Au regard des réformes adoptées dans les autres pays, quelle voie semble emprunter la Fédération de Russie ?
Tandis que la réforme de 1990 ne correspondait pas à la mise en place effective d’un régime d’assurance
sociale, l’adoption de la technique de financement du système d’assurance n’a fait que précipiter la crise suggérant
une possible remise en question du maintien du contrat implicite liant les générations entre elles en répartition.
Mais la réforme qui a été adoptée en 2002 et dont la mise œuvre s’étale sur plusieurs années suggère-t-elle
l’adoption d’un nouveau modèle des retraites ou bien une simple refonte du modèle ancien ? Est-ce que
l’introduction de la capitalisation est à même d’assurer que le système parviendra à garantir des retraites d’un
niveau adéquat ?
8 Holzman R. (1997), « Pension Reforms, Financial Market Development and Economic Growth : Preliminary Evidence from
Chile », Staff Papers, IMF, vol.44,n°2.
9 Heller P.S. (1998), « Rethinking public pension Reform Initiatives », IMF Working Paper, WP98/61, p.1-30.
10 Pour plus de détails voir Oksanen H. (2001), « A case for Partial Funding of Pensions with an Application to the EU Candi-
date Countries », Economic Papers, European Commission, n°149.
11 Brunner J. K. (1994), « Redistribution and the Efficiency of the Pay-as-you-go System », JITE, 150, p.511-523.
12 Branco, M.de Castello (2000), « Pension Reform in the Baltics, Russia and other Countries of the Former Soviet Union
(BRO) », IMF Working Paper, WP/98/11
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
166
Avant que ne soit adoptée la réforme de 2002, plusieurs programmes de réforme avaient été envisagés. Ainsi,
la notion d’un système à trois piliers proposé par la Banque Mondiale est examinée en 1995. Cette première
version prévoyait un premier pilier avec une pension uniforme et universelle, un second pilier versant une pension
d’assurance dont le montant serait déterminé à partir de la durée d’activité. Enfin, un troisième pilier volontaire de
comptes d’épargne gérés par des fonds privés. Seuls l’enregistrement des cotisations et le principe du calcul
individuel des pensions ont été adoptés en 1996 ce qui représente en soi un retour au principe de l’assurance.
Le programme de réforme se précise en 1998, les changements concernent le premier et le second pilier car il
prévoit de manière explicite l’introduction de la capitalisation. Tandis qu’initialement le premier pilier devait
assumer une redistribution sociale extensive, la pension de base serait désormais accordée aux plus nécessiteux et
financée par les recettes fiscales. Le second pilier visait l’instauration d’un système d’assurance pension
obligatoire entièrement capitalisé et géré par des fonds de pension privés conformément au modèle chilien13.
D’ailleurs, ce programme prévoyait un passage plus rapide à la capitalisation que le modèle chilien car la
participation au système capitalisé devait être rendue obligatoire non seulement pour les jeunes mais également
pour tous ceux qui auraient dépassé l’âge de 30 ans. Bien que la réforme chilienne prévoyait une adhésion
facultative pour les salariés déjà affiliés à l’ancien système, certaines mesures de nature fiscale, notamment, ne les
encourageaient guère à y rester.
L’introduction des fonds de pension privés n’était pas alors une nouveauté car parallèlement à la réforme de
1990, un système de fonds privés et corporatistes avait vu le jour en 1992 au moment de la privatisation de masse.
En 1998, il existait 280 fonds privés regroupant 2 millions d’adhérents dont 40 % des sommes étaient investies en
bons d’Etat, 40 % en titres de marché russe14.
Mais, la crise financière de 1998 ne va pas contribuer à plaider en faveur de l’adoption de la capitalisation
privée et donc d’une transition radicale vers un système pleinement fondé.
En fait, c’est dans un contexte marqué par la croissance économique et une amélioration de la situation
financière du Fonds de Pension que le gouvernement décide finalement de mettre en œuvre la réforme des
retraites à partir de 2002.
Cette réforme est une variante plus souple et plus graduelle de la réforme envisagée en 1998 qui correspondait
à l’application du « modèle banque mondiale ». Contrairement au modèle examiné en 1998, dans le nouveau
système, la pension de base dont le montant est forfaitaire est versée à tous ceux qui justifient au minimum d’une
durée d’activité de 5 ans. Les changements concernent surtout le second pilier et s’inspirent de la réforme des
pensions mise en place en 1999 en Suède en Lettonie en 1996. Ce dernier prévoit le versement d’une pension
d’assurance dont le financement associe la répartition et une extension progressive de la capitalisation sur une
base obligatoire. Concrètement, les cotisations prélevées sont enregistrées sur un compte individuel personnalisé
lequel doit prendre en compte la durée d’activité et le montant des salaires afin de pouvoir déterminer le montant
de la pension. Une part des cotisations versée est utilisée pour le financement des pensions courantes en
répartition, tandis que la part restante (2 % à 8 %), dont l’importance varie selon l’âge des participants au nouveau
système, est comptabilisée dans un compte spécial pour financer des pensions par capitalisation15. La part
financée par répartition est organisée selon un système de comptes notionnels à cotisations définies. De ce fait,
elle se caractérise par un renforcement de la composante assurance du système et par une réduction des éléments
redistributifs.
Dans le cadre du régime notionnel à cotisations définies, le montant de la retraite est fonction de la totalité des
revenus perçus pendant toute la vie active. La pension peut être ajustée en prenant en compte l’espérance de vie à
la retraite. Dans ce schéma, le fonctionnement de la répartition s’identifie à celui d’une capitalisation virtuelle.
Bien que les cotisations servent au financement des pensions courantes d’un point de vue macroéconomique, elles
s’accumulent dans des comptes individuels selon un taux de rendement notionnel qui correspond au taux de
rendement implicite que pourraient obtenir les individus si les cotisations étaient fixées dans le cadre du régime
par répartition. En fait, cette technique consiste à rendre explicite les caractéristiques actuarielles du système par
répartition. Les cotisations seraient perçues non comme un prélèvement mais comme une épargne ce qui permet
de restaurer le principe de l’assurance.
En théorie, les caractéristiques de ce système seraient celles d’un système par répartition à taux de cotisation
constant. Dans ce cas, en décomposant la durée de vie d’une génération quelconque en deux sous périodes et en
admettant que le taux de croissance démographique (n) et le taux de croissance des salaires (g) sont constants, le
taux de rendement implicite obtenu sur les cotisations pour une génération donnée vérifierait :
13 La réforme chilienne sert de référence compte tenu des caractéristiques communes qu’avait le système chilien à la veille de
la réforme avec le système de retraite de la Fédération de Russie. « Lors de son instauration en 1924, le système chilien fonc-
tionnait en capitalisation partielle et ne couvrait que les ouvriers. En 1952, il s’est transformé en répartition et s’est généralisé à
l’ensemble de la population. Ce système reposait sur l’existence de plusieurs caisses gérées sur des bases professionnelles, cor-
poratistes accordant des privilèges aux affiliés. Les pensions étaient de ce fait très inégales et d’un montant très faible. A la
veille de la réforme, le système de retraite était confronté à de graves difficultés financières en raison du chômage et du trans-
fert important d’emploi dans le secteur informel. Compte tenu du niveau élevé du taux de cotisation (65 % de la masse salari-
ale), c’est le budget de l’Etat qui a dû jouer le rôle de pompier ». Voir Charpentier F., (1996), Retraites et Fonds de Pension :
l’état de la question en France et à l’étranger, Economica, Paris, p.164-170.
14 Roussanov N., (2001), Russian Pension Reform, document disponible sur site internet.
15 Parallèlement, depuis janvier 2003, des régimes professionnels obligatoires ont été instaurés afin de prendre en charge le fi-
nancement des avantages accordés par l’ancien système à certaines professions à haut risque.
167
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Tout se passe comme si les pensions étaient ajustées en tenant compte de la progression du salaire moyen par
tête.
Il vient que le taux de remplacement s’ajuste de la manière suivante :
•t = • / (PT / L) = • / d
Dans cette hypothèse, le taux de remplacement obtenu à la date t (•t) est une fonction inverse du taux de
dépendance (d). Dans ce cas, le risque démographique est entièrement reporté sur les générations d’inactifs âgées
sous la forme d’une réduction de leur taux de remplacement.
La pension du second pilier comporte une partie capitalisée également à cotisations définies. Les cotisations
sont ainsi enregistrées sur un compte spécial. Le montant de la pension dépend de la période de cotisation, des
montants versés et des rendements obtenus à partir de l’investissement des cotisations dans des actifs financiers
(réels par opposition à la répartition).
Dans cette hypothèse, nous aurons :
•t wt = (1 + rt) • wt-1
Avec
•t = (1 + rt) • wt-1 / wt
où le taux de remplacement est une fonction décroissante du taux de croissance des salaires.
En fait, cette réforme introduit, sur un plan microéconomique, le principe de l’assurance qui était manquant
dans la réforme de 1990 sans toutefois lui garantir d'être réalisable concrètement d’un point de vue
macroéconomique.
D’un point de vue microéconomique, cette réforme suggère le passage d’un système dans lequel les retraites
sont identifiées à un droit de citoyenneté à un système où elles correspondent à une consommation différée quel
que soit le mode de financement. Dans les deux cas, la réforme vise une amélioration des caractéristiques mais
également des effets microéconomiques du système de retraite.
S’agissant de la partie financée par répartition, les cotisations rapportent un rendement fictif dépendant du
taux de croissance de la masse salariale. En fait, pour chaque génération, un équilibre actuariel est établi entre les
cotisations versées et les pensions reçues. En renforçant la composante d’assurance du système, l’objectif
recherché est une modification du comportement des individus en matière d’offre de travail et d’épargne. Ainsi,
en liant les pensions aux cotisations de matière plus étroite, le système de retraite est susceptible de créer un effet
de reconnaissance ; les coûts du système sont en fait rendus visibles aux individus. Dans la mesure où par
définition, le système est moins redistributif, il devrait créer un besoin d’épargne retraite. La création de comptes
individuels de retraite est également en soi un moyen d’agir sur l’incitation des salariés et de leurs employeurs à se
soumettre à la législation pour le versement des cotisations. D’ailleurs, certaines mesures ont été adoptées pour
améliorer le recouvrement des cotisations16. En outre, la prise en compte de l’espérance de vie dans le calcul du
montant de la pension a pour objet d’inciter les actifs âgés à travailler plus longtemps dans la mesure où le
montant de la pension est réduit en cas de retraite anticipée et augmente s’ils poursuivent une activité au-delà de
l’âge légal de la retraite.
S’agissant de la partie capitalisée du système, les cotisations correspondent à une véritable épargne forcée
dont le rendement dépend des rendements du capital.
Ainsi, la logique qui sous-tend la mixité répartition / capitalisation est celle d’une meilleure diversification des
risques puisque les rendements dépendent de différents types d’actifs : ils sont fictifs dans le premier cas et réels
dans le second. De plus, ces mesures ont théoriquement pour objectif une adaptation du système ancien à une
situation caractérisée par une différenciation croissante des salaires due au passage à l’économie de marché.
D’essence libérale, la réforme des aspects microéconomiques du système de retraite consiste finalement à
reporter les risques mais également la charge du financement des pensions sur les particuliers. La ventilation des
prélèvements destinés au financement des retraites entre ces différentes composantes révèle que la redistribution
n’est plus qu’une composante marginale du système de retraite pour accentuer le rôle joué par les composantes
d’assurance et d’épargne de la retraite au travers des systèmes à cotisations définies. En définitive, selon ce
schéma, la distribution des pensions futures ressemblerait à la distribution des salaires reproduisant ainsi les
inégalités dans un pays où les taux de pauvreté sont déjà élevés.
Toutefois, du point de vue de l’organisation et du financement, le principe de l’assurance se manifeste moins
nettement de sorte que l’on peut s’interroger sur la capacité du nouveau système à assurer une meilleure efficience
des cotisations, à améliorer la solvabilité à long terme des pensions, à favoriser la croissance et à garantir le
versement de pensions d un niveau adéquat. Alors que la réforme russe s’inspire du modèle suédois des pensions,
certaines des caractéristiques du système notionnel à cotisations définies pour la composante assurance des
pensions ne sont pas en place actuellement. De même, le rôle joué par le Fonds de Pension de la Fédération de
Russie dans la gestion des cotisations de la part capitalisée n’est pas neutre au regard des objectifs de
développement des marchés financiers, de croissance et de garantie des pensions.
16 Les entreprises en dépôt de bilan sont selon la loi de 1996 tenues au préalable de transférer les données relatives à leurs
salariés au Fonds de Pension. La loi mise en vigueur en janvier 2000 prévoit des pénalités correspondant à 10% du montant des
cotisations dues en cas de retard de paiement de cotisations ou de fausses déclarations. Voir Platonova T., (2000), « First Steps
of The Pension Reform », ICAR Newsletter, www.icar.ru, p1-2
http://www.icar.ru
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
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Contrairement au système à comptes notionnels introduits en Suède en 1999 et en Lettonie en 1996, les
modalités de calculs de la composante assurance de la pension du second pilier ne contribuent pas à garantir une
meilleure efficience et la solvabilité à long terme du système.
Alors que, dans les systèmes de comptes notionnels, l’indexation des cotisations et des pensions s’effectue sur
la progression du revenu moyen par tête, le droit à pension accumulé suit au mieux l’évolution de l’indice des
prix17. De même, les modalités de revalorisation des retraites ont pour effet d’atténuer le lien actuariel entre les
prestations et les cotisations individuelles. Contrairement à l’objectif recherché, les individus ne seraient donc pas
encouragés à cotiser dans le nouveau système. De la même manière, la formule du calcul de la pension
d’assurance n’encourage pas, comme dans les systèmes de comptes notionnels, les individus à retarder leur sortie
de la vie active. Les systèmes à comptes notionnels prévoient une modulation du montant de la pension en
fonction d’un coefficient établi en fonction de la durée de vie moyenne escomptée au moment de la liquidation de
la retraite qu’ils combinent à un recul de l’âge de la retraite comme en Lettonie ou à l’introduction d’un âge
flexible sur une base actuarielle comme en Suède. L’objectif est d’assurer la solvabilité à long terme du système
en introduisant par le biais d’une plus grande flexibilité un mécanisme autorégulateur de façon à permettre une
gestion sans devoir modifier régulièrement les paramètres du système. Pourtant, la réforme du second pilier laisse
inchangé l’âge de la retraite qui figure parmi les plus faibles en comparaison aux autres économies en transition
alors que l’espérance de vie à la retraite est comparable à celle de ces dernières. A priori, rien n’indique que la
réforme permette de compenser la hausse du ratio de dépendance vieillesse par une diminution du ratio de
dépendance au système. Si elle n’est pas suffisamment incitative, elle peut aggraver les difficultés financières du
régime par répartition et exercer une pression à la baisse sur les taux de remplacement.
L’introduction de la composante capitalisée de la pension est également utilisée parallèlement afin d’assurer
la soutenabilité financière à long terme du régime de retraite en réduisant les pressions que risque de faire peser la
charge des retraites sur les finances publiques au moment où les effets du vieillissement se manifesteront.
L’introduction de la capitalisation devrait permettre de soutenir la formation du capital, la croissance économique
et par là même d’aider le financement des pensions futures.
La méthode adoptée ne consiste pas à établir l’équilibre du régime public de retraite d’un point de vue
intergénérationnel par la réalisation de réserves temporaires au sein du régime par répartition pour aider le régime
de retraite à lisser les ajustements nécessaires et s’adapter à des effectifs de cotisants en diminution relative. Dans
ce dernier cas, il s’agirait d’augmenter les taux de cotisation au delà de ce qui est nécessaire pour financer les
pensions courantes au cours d’une période dont l’étendue dépendrait du niveau des taux de cotisation prélevés sur
les actifs, mais également des revenus d’intérêts qui s’accumuleraient dans le fonds de réserve.
Afin d’éviter les distorsions que pourrait engendrer une hausse du taux de cotisation, la réforme privilégie une
modification de la structure des recettes provenant des cotisations entre les deux premiers piliers. Ainsi, la moitié
des sommes prélevées (soit 14 %) est créditée sur le budget de l’Etat et allouée au Fonds de Pension pour financer
la pension de base du premier pilier. L’autre partie soit (14 %) est affectée au régime de pension d’assurance dans
le cadre du second pilier où une part soit (2 %),qui augmenterait progressivement en fonction de l’âge d’entrée
dans le nouveau système, serait versée sur des comptes d’épargne individuels pour être investie dans des
placements financiers.
La gestion de la partie capitalisée du second pilier a été organisée en deux étapes. Dans un premier temps
(2002-2003), seul le Fonds de Pension était responsable du placement des cotisations. Puis, depuis la fin de
l’année 2003 et le début de 2004, les individus ont la possibilité de transférer la gestion de leur compte d’épargne
individuel à des fonds de pension privés mais également à d’autres institutions financières comme les banques et
les compagnies d’assurance. Le Fonds de Pension reste toutefois une option pour ceux qui ne souhaitent pas
choisir eux-mêmes le mode de placement de cette part.
En fait, au cours de la phase transitoire et même à moyen terme, cette réforme suggère que l’on se trouve
dans un schéma de capitalisation partielle publique et non de capitalisation totalement sous administration privée.
D’un point de vue comptable, la contrainte financière du système d’assurance pension serait définie par la
combinaison des deux contraintes caractérisant respectivement la répartition et la capitalisation.
Dans le cadre de la répartition, le montant des cotisations Ct prélevées au cours de l’année t sert au
financement des pensions courantes Pt de sorte que le solde du régime de retraite satisfait la condition suivante :
Ct = Pt
Dans un régime par capitalisation, le montant des cotisations Ct sert théoriquement au financement du stock
de capital de la période suivante Ft+1. Le solde du régime de retraite capitalisé doit alors vérifier :
Ct = Ft+1
Et, les pensions Pt de la période courante seraient financées à partir des revenus d’intérêts rFt et du stock de
capital Ft constitué au cours de la période précédente, de sorte que :
Pt = (1 + r) Ft
La combinaison de ces deux soldes permet de définir la contrainte financière d’un système mixte :
Ft+1 + Pt = (1 + r) Ft + Ct
Cette contrainte peut être reformulée de façon à faire apparaître les composantes incarnant l’existence d’une
épargne potentielle :
Ft+1 – Ft = (Ct – Pt) + rFt
Où (Ct – Pt) correspond au surplus de cotisation alloué à la part capitalisée du second pilier.
17 Pour plus de détails voir Gersdorff (), p.4.
169
Selon le modèle recommandé par la Banque Mondiale, le fonctionnement du second pilier selon le principe de
l’assurance exigerait d’isoler la gestion des contributions d’assurance de toute influence politique afin qu’elles
contribuent effectivement au financement de la croissance. Or, l’organisation et le financement du second pilier
qui sous-tend cette réforme, d’un point de vue institutionnel, suggèrent que la Fédération de Russie n’est pas
totalement prête pour ce modèle d’assurance.
En effet, le schéma de capitalisation adopté dans le cadre du second pilier contribue à soulever plusieurs
interrogations liées entre elles :
- celle de l’autonomie du Fonds de Pension par rapport au budget de l’Etat ;
- celle de l’investissement des cotisations collectées et en particulier de l’incidence des surplus de
cotisation sur la conduite de la politique fiscale ;
- celle de l’accès des investisseurs institutionnels privés dans la gestion des comptes d’épargne.
Tandis que le financement des différents Fonds sociaux s’effectuait hors budget sous la réforme de 1990, les
cotisations sociales sont remplacées depuis 2001, date d’entrée en vigueur du nouveau Code fiscal, par un impôt
social unique prélevé par le ministère des Impôts et Taxes et entièrement à la charge des employeurs18. En fait,
cette réforme constitue un premier pas vers la rebudgétisation des moyens affectés aux fonds sociaux puisque les
cotisations sociales sont désormais définies comme un impôt. Les Fonds Sociaux sont transformés en simple
organe distributeur de prestations. En réduisant l’autonomie du Fonds de Pension, cette budgétisation peut
entraver le fonctionnement et le financement du système de retraite selon le principe de l’assurance. A priori, il
n’existe aucune garantie que l’Etat reverse effectivement la totalité des sommes collectées aux différents fonds.
Compte tenu de la nature du canal emprunté par les cotisations, on pourrait à juste titre s’interroger sur la
façon dont ces recettes pourraient affecter les différentes composantes de la contrainte budgétaire de l’Etat. Cette
question est étroitement liée à celle relative à la gestion et à l’investissement des cotisations. Compte tenu du
développement embryonnaire des marchés financiers, les cotisations sont majoritairement investies en titres
publics. De ce point de vue, la contribution de la capitalisation au financement de la croissance et des pensions
futures dépendrait davantage en dernier ressort de l’impact qu’elle aurait sur l’épargne nationale définie par la
somme de l’épargne publique et l’épargne privée. Il existe des risques de détournement dans l’utilisation des
contributions pour faciliter le financement du déficit budgétaire. Dès lors, le financement des pensions futures
pourrait rendre nécessaire une augmentation des prélèvements.
De plus, étant donné que 70 % de l’épargne des ménages est placée dans des comptes de dépôt à la banque
d’Etat, les individus ne semblent pas prêts à confier leur épargne aux institutions financières. Il est probable, du
moins à moyen terme, que les individus préfèrent maintenir leur compte d’épargne individuel au sein du Fond de
Pension et que les placements en actions ou en titres privés à revenus fixes soient moins importants que
prévus19.Ainsi, en 2003, moins de 2% des personnes éligibles au financement de la part capitalisée du système
(les hommes nés après 1952 et les femmes nées après 1956) ont choisi un gestionnaire privé d’investissement
parmi les 56 fonds de pensions privés autorisés.
Cette gestion privée se heurte au manque de formation et d’expériences nécessaires des salariés pour choisir
les placements les plus productifs. De ce point de vue, la réforme peut être à l’origine de nouvelles inégalités
parmi les futurs retraités. Seuls les salariés à revenus élevés, les plus jeunes ou les mieux informés sur les marchés
financiers pourraient se sentir concernés par la sélection des portefeuilles proposée par les gestionnaires de fonds.
De même, les gestionnaires privés pourraient être tentés de privilégier le revenu comme critère de sélection de
leur clientèle. Ainsi, d’un côté, les individus les plus âgés ou disposant de faibles revenus dont le placement des
cotisations serait confié à l’organisme public Vneshconombank20 qui investirait principalement en titres publics,
bénéficieraient de rendement plus sûrs mais plus faibles. D’un autre côté, les salariés à haut revenus confiant leurs
comptes à des gestionnaires privés dont l’objectif est la maximisation du rendement des actifs pourraient espérer
des rendements plus élevés mais subiraient en contrepartie des risques plus élevés.
Le problème qui se pose alors est celui de la sélection des sociétés de gestion qui peut rendre nécessaire la
mise en place d’un organe de surveillance pour pallier le manque de qualification des organismes de gestion et
pour instituer des sauvegardes légales21. La réforme de 2002 suggère de ce point de vue que la gestion privée ne
18 Les taux de l’impôt social unique sont calculés selon un barême dégressif afin d’inciter les employeurs à augmenter les
salaires. Voir Stoliarov B., (2000), « Le programme social du gouvernement russe », entretien avec Matvienko V., traduit du
russe par Berton-Hogge R., le Courrier des pays de l’Est, n°1007, p.72-76.
19 Même dans l’hypothèse où les sommes seraient placées en action, il convient de souligner que ce pilier ne peut être valable-
ment envisagé que sur une très longue période. « La référence au système chilien permet d’illustrer l’argument. Le système
chilien a été bâti sur l’hypothèse d’un rendement annuelle de 6 % ce qui permettait aux retraités une pension au moins égale à
leur rémunération. La rentabilité enregistrée correspond à un taux moyen de 12 à 13 % en termes réels cela en raison de la
situation particulièrement favorable des marchés financiers. Mais selon les experts, un tel résultat ne pourra être maintenu à
long terme dans une économie qui ne semble pas pouvoir croître à long terme à un rythme supérieur à 6 %. A terme, les prévi-
sions sur le rendement ne dépassent pas 4 % ce qui correspond à un taux de remplacement de 44 % du salaire. De plus, les ren-
dements évoqués précédemment ne sont que des rendements théoriques car il faut bien tenir compte du fait que le système en-
caisse des cotisations mais ne verse que peu de pensions ». Voir Charpentier F., (1996), Retraites et Fonds de Pension : l’état
de la question en France et à l’étranger, Economica, Paris, p.181.
20 La Vneshconombank est chargée de gérer non seulement les cotisations du Fonds de Pension qui doivent être placées en ti-
tres publics mais également la dette extérieure de la Russie. Elle est de ce point de vue confrontée à deux objectifs conflictuels.
Voir l’article de S. Blagov, « Case Study : Russian Pension System Faces Major Revamp ».
21 Charpentier F., (1996), Retraites et Fonds de Pension : l’état de la question en France et à l’étranger, Economica, Paris,
p.181.
Valérie BERENGER
L’INSTAURATION D’UN SYSTEME A VOLETS MULTIPLES POUR LES RETRAITES EN FEDERATION
DE RUSSIE : MODELE CHILIEN OU SUEDOIS?
170
s’affranchit pas de l’influence et du contrôle de l’Etat. Les fonds de pensions sont soumis à une gestion
prudentielle qui impose des restrictions en matière de placements car elle privilégie les actifs domestiques et en
particuliers les titres publics pour contourner l’état embryonnaire des marchés financiers. Depuis 2004, les
placements en actifs étrangers sont autorisés mais ne doivent pas dépasser 20% du portefeuille
d’investissement22. Bien que ces règles aient pour finalité la protection des futurs retraités, elles peuvent créer
une dépendance de l’Etat vis-à-vis des ressources des fonds et avoir ainsi pour effet de limiter la diversification
des risques et de freiner le développement des marchés financiers.
Bien que la réforme vise à opérer un passage graduel à la capitalisation privée, son instauration et sa taille
n’en sont pas moins soumises à des changements de politique économique. Au regard des arguments justifiant
l’introduction de la part des retraites fonctionnant en capitalisation, la réussite de la réforme est conditionnée par
les réformes qui seront menées notamment dans le domaine administratif afin d’améliorer la gestion des données
relatives aux comptes personnels, dans le domaine financier de façon à s’assurer de l’existence d’une
infrastructure financière de base et dans le domaine des finances publiques afin que l’investissement des
cotisations en obligations publiques soit cohérent avec la stratégie de gestion de la dette publique.
D’un point de vue institutionnel, les modalités de mise en œuvre du second pilier n’indiquent en rien que le
nouveau régime de retraite sera à même de garantir le versement de pensions différenciées et étroitement liées aux
salaires, conformément au principe de l’assurance. Le pire des scénarios serait d’aboutir à une situation où le
montant des pensions ne dépasserait pas le niveau de la pension minimum, ce qui ne serait pas totalement à
exclure dans l’hypothèse de volatilité des marchés financiers, de la menace de l’inflation et d’une utilisation
détournée des fonds. De plus, comme les cotisations sont fixées, le montant et le pouvoir d’achat des pensions est
soumis à des risques multiples même dans l’hypothèse où les fonds seraient entièrement gérés de manière privée.
Il y a les risques liés à la gestion des fonds qui peuvent provoquer des inégalités entre individus. Pour répondre à
ces problèmes, l’Etat devrait garantir le versement d’une pension minimum. Or, dans l’hypothèse d’école où
l’ensemble des fonds afficherait des pertes, l’Etat ne pourrait assurer le versement d’une pension minimum qu’au
détriment d’autres dépenses sociales.
Enfin, il faut tenir compte des risques liés aux incertitudes de l’économie notamment dans un environnement
mondialisé. Le montant de la pension dépend de beaucoup d’inconnues : de l’évolution à long terme des taux
d’intérêt, des taux de change, de l’inflation et du cours des titres. Autant de risques qui sont des risques sociaux
non assurables.
Dans les pays où les fonds sont importants, le placement des sommes peut exercer une influence sur les
mouvements internationaux des capitaux et les cours boursiers. Le risque est alors que les mesures prises en
matière de politique économique privilégient les cours boursiers plutôt que les mesures de relance économique.
Quel que soit le mode de financement, le niveau des pensions dépendra des performances de l’économie en
matière de croissance, de l’inflation, de la croissance des salaires et de la situation budgétaire de l’Etat.
En guise de conclusion, l’analyse du système de retraite de la Fédération de Russie a permis de montrer dans
quelle mesure la crise de financement du système des retraites russe présentait des caractéristiques particulières
par rapport aux économies de marché. Ainsi, comme nous l’avons montré, cette crise est due aux circonstances de
la transition mais également à la réforme de l’organisation et du financement du régime des pensions. Avec la
réforme de 1990, la protection sociale prend les apparences du modèle de l’assurance sociale alors que les
conditions concrètes de sa mise en œuvre sont loin d’être établies. La séparation « fictive » du fonds de pension du
budget de l’Etat aurait contribué à rendre explicite l’inadaptation du système ancien aux exigences de l’économie
de marché. Les difficultés tiennent pour partie au fait qu’aucun modèle de protection sociale et de retraite en
particulier, déterminant les finalités du régime de retraite, n’a été associé à la réforme de l’organisation et du
financement du système soviétique.
La Fédération de Russie s’est alors engagée dès 1998 avec le soutien de la Banque Mondiale à adopter une
variante du modèle à plusieurs piliers. Alors qu’elle prévoyait une introduction plus radicale de la capitalisation
inspirée de la réforme chilienne, la réforme de 2002 suggère une attitude de prudence et de réserve concernant la
place de la capitalisation dans le cadre du modèle à plusieurs piliers. Le second pilier associe la répartition selon
un système à cotisations notionnelles définies inspiré de la réforme suédoise et une extension progressive de la
capitalisation sur une base obligatoire. En fait, cette réforme introduit le principe de l’assurance qui était
manquant dans la réforme de 1990 sur un plan microéconomique sans toutefois lui garantir d'être réalisable
concrètement d’un point de vue macroéconomique. L’introduction de la capitalisation n’est pas sans faire resurgir
certaines interrogations relatives notamment à la question de l’autonomie du Fonds de Pension par rapport au
budget fédéral dans la gestion des sommes prélevées. L’étude de l’organisation et des modalités de financement
du second pilier qui sous-tend cette réforme, d’un point de vue institutionnel, suggère que la Fédération de Russie
n’est pas totalement mûre pour ce modèle d’assurance.
Selon notre analyse, la transition économique aurait exacerbé des problèmes latents, absents ou cachés dans le
système antérieur, tandis que les réformes mises en oeuvre rendent compte des difficultés que pose le greffage
d’un modèle de protection sociale d’économie de marché à un système adapté au fonctionnement d’une économie
planifiée.
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Валери Беренжер
ПРОВЕДЕНИЕ МНОГОСТУПЕНЧАТОЙ ПЕНСИОННОЙ РЕФОРМЫ В РОССИИ:
ЧИЛИЙСКАЯ ИЛИ ШВЕДСКАЯ МОДЕЛЬ?
В течение переходного периода, социальная защита не находилась в центре дискуссий исследовате-
лей, руководителей и международных экспертов. Можно отметить две причины отсутствия интереса к
этому вопросу.
Вначале, при коммунистическом строе, социальная защита не могла реально существовать как тако-
вая, государство предоставляло гарантированные и неприкосновенные социальные права. Крушение пла-
новой экономики выражалось в отказе от любой формы вмешательства государства и в способности рын-
ка регулировать производство и распределение ресурсов.
Однако, переходный период сильно расшатал идеологические устои социалистических режимов свя-
занных с падением реальных доходов, появлением безработицы и бедности. Система социальной защиты
быстро оказалась абсолютно неэффективной, чтобы адекватно отреагировать на новые проблемы, появ-
ляющиеся в сильно изменившейся экономической обстановке. Они даже поспособствовали проявлению
неравенства. Правительство в переходной экономике вскоре осознало необходимость сопровождать эко-
номическую реформу социальной. Для этого есть возможность воспользоваться поддержкой международ-
ных организаций таких, как МВФ и Всемирный банк, для которых важность социальной реформы очень
значительна, по сравнению с экономической и политической реформами.
Всемирный банк, который обычно использует свои резервы для финансирования прибыльных проек-
тов или сложных инфраструктур, предлагает свою модель социальной защиты и поддерживает те страны,
которые обязываются следовать этой модели.
Рекомендованные реформы касаются, главным образом, пенсий, которые являются главной состав-
ляющей системы социальной защиты. Во всех развитых, развивающихся или переходных экономиках ви-
ды пенсионного обеспечения, основаны на перераспределении доходов населения, и они проходили через
кризис финансирования, который считается не просто проходящим, но длительным и глубоким. Демо-
графический кризис, в результате которого, выплата пенсий из доходов активной части населения снижает
финансовую стабильность и благополучие, вот негативные проявления этого режима.
Указанные выше проблемы заставили нас заново заговорить о принятии режима перераспределения
или накопления. Таким образом, Всемирный банк и МВФ считают, что необходимым является принятие
системы, включающей в себя три направления и основанной на накоплении.
С конца девяностых годов, некоторые страны Центральной и восточной Европы, а также бывшего
СССР занялись реформацией своих пенсионных режимов для того, чтобы они соответствовали характери-
стикам рыночной экономики. В процессе указанных выше реформ каждая страна выбрала свою модель.
Хотя, эти страны и выбрали разные пути, накопление представляет собой, в той или иной степени, выход
из финансового кризиса, появляющегося при перераспределении средств. Таким образом, Венгрия
(1998г.), Чешская Республика и Польша (1999г.) решили ввести смешанные системы, объединяющие пе-
рераспределение и накопление.
Казахстан (1998г.) – страна, которая провела больше всего реформ в своей системе, основываясь на
чилийской модели перераспределения средств.
Российская Федерация в этой сфере остановила свой выбор на том, что накопление является наилуч-
шим решением социальной защиты. Программа реформы 1998 года, внедрение которой началось в 2001
году, растянулась на несколько лет, и предусматривало введение системы, которая была бы основана на
трех направлениях, описанных ниже и отличающейся постепенным расширением роли накопления. В то
же время управление не может полностью быть реализовано в частных службах, по крайней мере, во вре-
мя его адаптации. Реформирование подразумевает новые решения, касающиеся целей, условий финан-
сирования, правил предоставления финансирования, указанные выше цели требуют создания новой мо-
дели социальной защиты, которая в данный момент находится в фазе разработки.
Мы предлагаем взять за основу иностранный опыт в вопросе о программе пенсионного обеспечения и
социальной защиты населения, чтобы рассмотреть и оценить существовавшие реформы пенсионных сис-
тем, проводимых Российской Федерации в начале переходного периода. Именно через анализ русской
системы, мы хотели бы показать, что вопрос о реформах сводится не только к выбору метода финансиро-
вания (распределение или накопление), но он должен учитывать бремя прошлого, а также целесообраз-
ность бюджетных положений, в рамках которых функционирует пенсионная система.
Во-первых, следует выяснить финансовые трудности пенсионного фонда, функционирующего через
распределение и изучить отличительные черты этого кризиса по сравнению с тем, через который прошли
западные страны.
Во вторую очередь, принимая в расчет характеристики общественной, политической и экономической
http://www.worldbank.org.ru/
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